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TEXTE Cécile

PHOTOS Mélinda

María López n’a pas le droit de vote aux Etats-Unis : elle est mexicaine. Pourtant, ce samedi 27 octobre, elle ira toquer aux portes de son voisinage de Houston pour inciter les Latinos à aller voter. « Nous qui n’avons pas de papiers, nous avons besoin que les membres de notre communauté participent, car nous ne sommes pas traités comme des êtres humains », estime cette quadragénaire arrivée dans la première ville du Texas en 2001 avec un visa tourisme.



Le porte-à-porte ne représente qu’une petite partie de l’activité militante de cette femme de ménage. Avec ses collègues de Houston syndiqués au Service Employees International Union (SEIU), elle s’est mise en grève pendant près d’un mois en juillet afin de défendre ses avantages sociaux.



UN MOIS DE GREVE POUR UN DOLLAR D’AUGMENTATION



Ces derniers « sont limités : il s’agit d’une assurance santé, d’une semaine de congés payés à partir de quatre années d’ancienneté (deux au-delà de cinq ans) et des jours fériés payés. Mais dans notre secteur qui n’est pas protégé par le National Labor Relations Act [la loi de 1935 encadrant le dialogue social], c’est déjà beaucoup et nos employeurs voulaient les supprimer. Alors en juin, nous avons débrayé, afin de leur montrer que nous étions résolus à faire grève.

Les patrons savent que nous faisons un travail très dur et que tout le monde n’est pas disposé à le faire pour 8,35 dollars de l’heure sans cotiser pour la retraite. Ils devraient prendre nos revendications en compte. Autrement, leurs porte-monnaie pourraient en payer les conséquences. Mais nous avons dû faire grève pendant près d’un mois pour obtenir gain de cause ainsi qu’un dollar d’augmentation sur quatre ans ».









































« CE N’EST PAS ÇA LE RÊVE AMÉRICAIN »



Il y a des chances qu’avec la hausse du coût de la vie, ce dollar supplémentaire ne change pas beaucoup la donne pour María, son concubin Gastón Izaguirre (ouvrier dans le bâtiment) et sa fille de neuf ans, Shiomara. « Nous n’épargnons pas, nous ne sortons pas le week-end (à part pour aller à l’église) et nous ne partons pas en vacances ».



La vie de famille pâtit du rythme de travail de María, qui quitte le domicile familial à 17 heures, une demi-heure après le retour de son mari parti à six heures du matin, et ne rentre qu’à minuit, après avoir nettoyé les sols de 22 étages ainsi qu’une centaine de toilettes, pour 900 dollars mensuels. « Ce n’est pas ça le rêve américain ».



PARENTS ILLÉGAUX, FILLE AMÉRICAINE



De fait, les objectifs que María s’était fixés avant de partir : économiser pour acheter une maison et une voiture au Mexique, où elle n’arrivait pas à faire valoir son diplôme de secrétaire de direction, semblent bien loin. « Le travailleur ne prospère pas ici. Les riches deviennent de plus en riches et les pauvres de plus en plus pauvres. Je ne conseille pas aux Mexicains de venir, même si je n’aimerais pas travailler dur au Mexique avec en plus l’inquiétude de l’insécurité ».



Mais Shiomara est américaine. Elle ne ramène que des bonnes notes, veut devenir vétérinaire et commencer le ballet ainsi que la gym, en plus du karaté (discipline dans laquelle elle est ceinture verte). « Alors pour lui montrer comment on défend ses droits et lui donner envie de faire mieux que nous, je l’ai emmenée manifester, confie María, qui voudrait un second enfant. C’est pour elle que nous nous battons. Pour lui mettre chaque jour un repas sur la table. Même si nous risquons toujours d’être séparés ».

 

Les photos 

Maria et sa fille Shiomara.

Les López-Izaguirre – L’Amérique sans le rêve ni les papiers

Shiomara est née sur le sol américain.

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